Introduction aux palatalisations

 

Les palatalisations sont, comme nous l’avons vu précédemment, une réalisation de la règle 3 des transformations des suites Consonne – Voyelle (https://linguotheque.huma-num.fr/regles-de-transformation-des-suites-consonne-voyelle/ et https://linguotheque.huma-num.fr/la-suite-consonne-dure-voyelle-molle/).

Nous avons déjà insisté sur l’importance d’avoir bien compris ce phénomène pour pouvoir aborder sereinement les arcanes de la morphologie tchèque, tant flexionnelle que dérivationnelle.

Nous aborderons en premier lieu les palatalisations d’une consonne unique, ce que j’ai nommé « palatalisations monoconsonantiques ». Celles-ci seront subdivisées en palatalisations des consonnes dures, elles-mêmes étudiées par sous-groupes (consonnes gutturales, « r » et consonnes dentales) et en palatalisations des consonnes mixtes où l’on distinguera les consonnes mixtes avec variation de la consonne et les consonnes mixtes affectées uniquement par le contexte phonétique (voyelle « ě »).

Ces palatalisations monoconsonantiques nous semblent être les plus importantes et nous en ferons un examen détaillé à l’aide de tableaux à 3 lignes :

 

 

En première ligne sont énumérées les consonnes dures (premier tableau) ou les consonnes mixtes (deuxième tableau). On trouvera, à la verticale de chaque consonne dure ou mixte, les consonnes molles correspondantes pour chacune des palatalisations possibles : « mouillures faibles » en deuxième ligne du tableau, « mouillures fortes » en troisième ligne.

 

 

 

Nous tenterons d’affecter à chacun des deux niveaux (2ème et 3ème lignes) des domaines morphologiques spécifiques qui devraient vous aider dans l’apprentissage et la manipulation des palatalisations.

 

Nous examinerons en dernier lieu les palatalisations de groupes consonantiques.

Nous y distinguerons deux ensembles :

        • les palatalisations agissant dans la flexion d’adjectifs durs (nominatif et vocatif pluriel ) liés à un substantif masculin animé
        • les palatalisations liées à la dérivation de participes passés passifs ainsi que des adjectif dur et du substantif verbal dérivés.

L’une des palatalisations est commune aux deux ensembles.

 

La suite consonne molle – voyelle dure

 

Des deux règles avec changement énoncées précédemment (Cf. https://linguotheque.huma-num.fr/regles-de-transformation-des-suites-consonne-voyelle/) :

la règle 4 qui exprime la transformation de la suite « consonne molle – voyelle dure » est la plus simple et la plus limitée.

 

I.  Implications historiques

La règle 4 explique des transformations historiques intervenues dans la seconde période de l’évolution phonologique du tchèque (entre le 11ème et le 14ème siècle). Il s’agit de :

a.  la suite « consonne molle – a » qui devient « consonne molle – ě » (voir https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-a-en-e/) (« ě » devenant par la suite « e », ce qui est expliqué à l’adresse https://linguotheque.huma-num.fr/a-propos-de-la-double-mouillure-de-e/) qui donne p. ex. en tchèque « duše » (âme) qui est « duša » dans les autres langues slaves

 et de :

b.  la suite « consonne molle – u » qui devient « consonne molle – i » qui explique qu’en tchèque « ľud» soit devenu « lid » (peuple) (voir https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-u-en-i/).

 

II.  Implications actuelles

En tchèque actuel où la seule opposition de mouillure vocalique qui demeure est l’opposition entre « y / ý » et « i / í », cette règle 4 possède encore deux usages intéressants :

a.  Mémoriser cette règle sous la forme « consonne molle – y/ý devient consonne molle – i/í » permet d’éviter des fautes de flexion. Même s’il n’y avait pas de modèles particuliers pour la déclinaison des substantifs mous (animés et inanimés), la production de la forme correcte de l’instrumental pluriel serait assurée par l’application de cette règle :

 

 

D’une manière générale, il convient d’assurer la correction de sa production écrite en vérifiant que derrière une consonne molle il n’y a pas un « y/ý » (« i » dur).

b.  Le non-respect de cette règle donne au mot concerné la valeur d’emprunt, l’application de cette règle étant obligatoire en tchèque.

Ainsi, nos programmes d’analyse automatique de la morphologie tchèque reconnaissent que le mot « cykl » est étranger grâce à la suite « c – y » (consonnemolle – y ») alors que la structure du mot « consonne  –  voyelle  –  k  –  l » peut être parfaitement tchèque.

Des verbes tels que « říci », « péci » ou « téci » produisent un passé masculin en :

                        ř  –  e  –  k  –  l

                        p  –  e  –  k  –  l

                        t  –  e  –  k  –  l

comme:

                        c  –  y  –  k  –  l

Règles de transformation des suites consonne – voyelle

 

Ayant présenté l’inventaire des consonnes (https://linguotheque.huma-num.fr/consonnes-dures-molles-et-mixtes/) et des voyelles (https://linguotheque.huma-num.fr/voyelles-dures-molles-et-par-analogie-mixtes/), dures et molles, il est désormais possible d’aborder les suites « consonne – voyelle » et leurs éventuelles transformations.

Il est nécessaire d’insister sur le fait que seul l’ordre « consonne – voyelle » est considéré et pertinent, l’ordre inverse « voyelle – consonne » étant une succession stable.

Il convient de savoir que ces suites doivent être « à l’unisson » en termes de dureté, toutes deux dures ou toutes deux molles. Dans le tableau ci-dessous, la règle 1 réfère à deux dures, la règle 2 à deux molles.

En second lieu, les suites dissemblables se transforment toujours en une suite molle. C’est donc l’élément dur qui est transformé dans son correspondant mou, que ce soit la consonne qui est palatalisée (règle 3) ou la voyelle (règle 4). Dans ce dernier cas, en tchèque contemporain, la transformation ne s’exerce que pour « y » ou « ý » qui devient « i » ou « í ». Les transformations de « a » vers « ě » (Cf. https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-a-en-e/) et de « u » vers « i » (https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-u-en-i/) sont historiques.

Voici un tableau récapitulatif auquel nous nous référerons par la suite :

 

 

Nous étudierons d’abord la règle 4 dont l’application est limitée avant d’aborder le vaste chapitre des palatalisations (règle 3).

 

Voyelles dures, molles et, par analogie, mixtes

 

 

La tradition scolaire tchèque classe les voyelles en 2 séries : dures et molles. Le tableau proposé ci-dessous introduit le concept de « mixte » repris de la logique utilisée pour les consonnes. En tchèque moderne, la seule opposition de mouillure fonctionnant pleinement est celle des « y/i » avec des i durs (« y » et « ý ») opposés à des i mous (« i » et « í »).

La question du « e » mou (« ě ») est plus délicate et est liée de manière importante à un héritage diachronique, celui de la transformation historique de « a » à « ě » et « e » qui pourra être consultée en détail à l’adresse https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-a-en-e/.

Cette transformation est contemporaine de celle qui a produit « i » à partir d’un « u » dans le même patron Consonne molle – Voyelle dure que précédemment, mais ici l’influence se fait sentir surtout dans le lexique. Nous avons par exemple « lid » (peuple) là où le slovaque a « ľud », et plus largement les autres langues slaves. On pourra se reporter à https://linguotheque.huma-num.fr/la-transformation-de-u-en-i/.

 

 

Si le « e » long est indubitablement dur, il n’en va pas de même pour le « e » bref  qui peut être dur, mais aussi de nature molle dans un contexte Consonne molle – « e » où ce « e » est le résultat de la suppression du háček par interdiction de double mouillure. C’est le cas notamment dans la construction de la forme en « ě  » des adverbes ou dans la flexion. La vidéo de la page suivante (https://linguotheque.huma-num.fr/a-propos-de-la-double-mouillure-de-e/) donne l’exemple de la flexion de féminins durs terminés en « -a ». A la flexion au datif et locatif en « ě » d’un mot tel que « žena » (femme) qui donne « ženě » il est possible d’opposer les mêmes cas d’un mot tel que « holka » (petite fille) qui donne la forme « holce », passée par une forme implicite « holcě ». Dans des situations de ce type, « e » ne peut pas être considéré comme voyelle dure. Cela serait en contradiction avec le fonctionnement systémique des suites Consonne – Voyelle (Cf. https://linguotheque.huma-num.fr/regles-de-transformation-des-suites-consonnes-voyelles-video/).

Le « e » bref est donc classé en tant que voyelle « mixte » par analogie avec le fonctionnement des consonnes mixtes.

Etude des palatalisations des consonnes gutturales

 

 

I.1.a. Les consonnes gutturales

I.1.a.1. L’alternance k-c-č

Nous prendrons comme référence le tableau ci-dessous pour présenter et expliquer les palatalisations correspondantes.

 

 

1ère palatalisation :

Flexion de substantifs

Le substantif féminin dur « ruka » (main) produira au singulier un datif et un locatif, au pluriel (anciennes formes de duel) un nominatif, un accusatif et un vocatif en « ruce ».

De même, le substantif féminin dur « holka » (petite fille) fera au datif et au locatif du singulier « holce » ainsi que « babička » (grand-mère) qui fera « babičce » et « Aněžka » (Agnès) qui fera « Aněžce ».

Le substantif masculin dur animé « kluk » (garçon) donnera « kluci » au nominatif pluriel, « pták » (oiseau) donnera « ptáci » et « drak » (dragon) fera « draci ».

Le substantif masculin inanimé « rok » (année) a une forme « (v) roce » (dans l’année) à côté d’une forme plus courante « roku ».

Flexion d’adjectifs

Les adjectifs durs, c’est-à-dire terminés par la désinence « ý » au nominatif singulier masculin, forment le nominatif pluriel associé à un substantif masculin animé avec la désinence molle « í » qui va entraîner une palatalisation du premier niveau, par exemple « hezký » (joli, beau) fait « hezcí » au nominatif et au vocatif pluriel masculin animé : « hezcí páni » (de jolis messieurs).

Génération d’adverbes

La désinence « ě » provoque la palatalisation du « k » final du radical de l’adjectif comme pour « lehký » (léger) qui produit « lehce » (légèrement), « měkký » (mou) qui fait « měkce » (mollement, doucement), « hladký » (doux, lisse) qui donne « hladce » (doucement).

Le cas particulier des verbes à l’infinitif en –ci

Des verbes tels que « péci » (cuire au four) ou « téci » (couler) (qui, en tchèque parlé, peuvent être entendus en « péct » et « téct » par analogie avec les formes standard d’infinitif) sont issus respectivement d’une racine « PeK » et « TeK » que l’on retrouve dans les formes du passé « pekl » et « tekl ». Les formes originelles de ces infinitifs sont données en « pekti » et « tekti ». Dans le Missel de Kiev (Kyjevské listy), copie du 10ème siècle d’un manuscrit du 9ème, on trouve ce que l’on appelle un « moravisme » par rapport à la langue vieux slave telle qu’elle devait être parlée dans la zone de la Macédoine et de la Bulgarie actuelles, à savoir déjà la présence de « c » à la place de « kt ».

 

2ème palatalisation :

Dans la conjugaison

Originellement, le verbe « péci » avait une conjugaison régulière en « peku » (je fais cuire), « peče » (il fait cuire) dans la logique du système « consonne dure + voyelle dure » demeure « consonne dure + voyelle dure » (« k + u ») et « consonne dure + voyelle molle » donne « consonne molle + voyelle molle » (« k ⇨ č + e »). Il en va de même pour le verbe « téci » qui donnait les formes « teku » et « teče » (il coule). Les formes analogiques de 1ère personne du singulier « peču » et « teču » sont des formes relativement récentes erronées entrées dans la norme. Cela donne une nouvelle norme qui ne tient pas compte du système linguistique.

Face à ces formes personnelles, on trouve également des formes impersonnelles du verbe, notamment les participes. Un bon exemple est la formation à partir de la racine « PeK » du participe passé passif « pečen » qui lui-même permet la formation de l’adjectif dur issu du participe « pečený » (cuit) et du substantif verbal « pečení » (cuisson).

Dans la dérivation

Si nous reprenons les exemples introduits dans la partie précédente (1ère palatalisation), nous obtiendrons des formes dérivées marquées par la 2ème palatalisation. Nous avons vu dans la leçon précédente que le mot « babička » possède un adjectif d’appartenance en « babiččin » par transformation de « k » en « č ». Nous trouverons de la même manière « Aněžka » (Agnès) qui aura un adjectif d’appartenance en « Aněžčin ».

La formation d’un autre genre, par exemple la formation du féminin sur la base du substantif masculin correspondant est souvent concernée par cette 2ème palatalisation. Ainsi, le substantif masculin animé « drak » (dragon) a pour femelle « dračice ».

La formation des diminutifs est souvent marquée par une 2ème palatalisation, par exemple le substantif masculin animé « kluk » (garçon) peut donner « klučík » (petit garçon), le substantif « pták » donne « ptáček » (petit oiseau) à côté du substantif neutre appartenant au modèle des petits d’animaux « ptáče » (oisillon). On trouvera également l’adjectif relatif aux animaux « ptačí » (d’oiseau).

Du substantif féminin dur « ruka » (main), on trouvera le diminutif « ručička », mais aussi un adjectif dérivé comme « ruční » (manuel, à main). De même, le substantif masculin inanimé « rok » (année) produit un adjectif dérivé « roční » (annuel). Ces deux palatalisations peuvent sembler surprenantes. Elles sont expliquées par la présence originelle devant le suffixe et la désinence d’un jer mou de rang impair qui a disparu, mais qui a produit la palatalisation (Voir : https://linguotheque.huma-num.fr/disparition-et-vocalisation-des-jers/). On trouvera ainsi le diminutif premier de « ruka » en « ručka » qui permettra ensuite la dérivation de « ručička ».

Notons également la réalisation de l’adjectif mou « holčičí » (de petite fille) à partir du substantif « holka ».

Parmi les phénomènes de dérivation, on remarque également la création de verbes à partir d’une autre catégorie lexicale. Nous donnerons ici l’exemple de « skok » (saut), substantif masculin inanimé, qui est la racine du verbe « skočit » (sauter) par transformation du « k » en « č ».

Au titre de la 2ème palatalisation, il convient de présenter la formation du comparatif (et du superlatif) des adverbes. Ainsi, « lehce » (légèrement) a la forme de comparatif « lehčeji » (plus légèrement), « hladce » a le comparatif en « hladčeji » et « měkce » en « měkčeji ». Les terminaisons « eji » sont entendues dans la langue parlée en « ejc ».

De la même manière, on trouvera le comparatif et le superlatif de l’adjectif « hezký » en respectivement « hezčí » et « nejhezčí ».

 

Récapitulation des exemples :

        • « tekl » – « téci » – « teče »
        • « pekl » – « péci » – « peče » / « pečen »
        • « babička » – « babičce » – « babiččin »
        • « Aněžka » – « Aněžce » – « Aněžčin »
        • « ruka » – « ruce » – « ruční » / « ručka » – « ručička »
        • « rok » – « roce » – « roční »
        • « drak » – « draci » – « dračice»
        • « kluk » – « kluci » – « klučík »
        • « pták » – « ptáci » – « ptáček » / « ptáče » / « ptačí »
        • « holka » – « holce » – « holčička » / « holčičí »
        • « hezký » – « hezcí » – « hezčí »
        • « skok » – « — » – « skočit »
        • « lehký » – « lehce » – « lehčeji »
        • « hladký » – « hladce » – « hladčeji »
        • « měkký » – « měkce » – « měkčeji »

 

I.1.a.2. L’alternance h/g-z-ž

Ce n’est pas un hasard si l’entrée de cette alternance est double en « h » et « g ». En effet, le « g » en tchèque, mais aussi en slovaque et en haut-sorabe, s’est transformé en « h » (cf. grammaire historique : https://linguotheque.huma-num.fr/passage-de-g-a-h/). Un « g » dans un texte tchèque est un critère de reconnaissance d’un terme étranger. En ce qui concerne les palatalisations, leur fonctionnement est demeuré identique.

Nous allons examiner cette seconde série d’alternances, seconde colonne du tableau ci-dessous, suivant les mêmes critères que pour « k – c – č ».

 

 

1ère palatalisation :

Flexion de substantifs

Les substantifs féminins durs terminés par un radical en „h“, c’est-à-dire avec une terminaison « -ha » subissent la 1ère palatalisation pour le datif et le locatif singulier. Ainsi, « noha » (pied, jambe) fait « noze » au datif et locatif singulier, par exemple « na noze » (sur la jambe, sur le pied). Il en sera de même pour « váha » (poids, bascule) qui fait « váze » au datif et au locatif, pour « snaha » (tentative, effort) qui fait « snaze » ou « obloha » (voûte céleste ; garniture) qui fait « obloze ».

Avec des substantifs terminés en « -ga », nous trouverons des exemples tels que « liga » (ligue, division) qui a un datif et un locatif singulier en « lize » ou le prénom d’origine russe « Olga » qui fait « Olze ».

L’une des formes possibles de nominatif pluriel du substantif masculin animé « koželuh » (tanneur) est « koželuzi ». Le nominatif pluriel du substantif masculin dur animé « soudruh » (camarade de parti) est « soudruzi », celui de « dobrodruh » (aventurier) est « dobrodruzi », celui de « vrah » (assassin) est « vrazi ». L’ensemble de ces substantifs possède une désinence alternative en « -ové », par contre « pstruh » (truite) ne possède que la forme unique « pstruzi ».

Flexion d’adjectifs

Les adjectifs durs terminés par la désinence « ý » au nominatif singulier masculin, forment au pluriel le nominatif et le vocatif associés à un substantif masculin animé avec la désinence molle « í » qui va entraîner la palatalisation. Ainsi, « drahý » (cher) prendra la forme « drazí », par exemple « drazí přátelé » (chers amis). L’adjectif « strohý » (austère) donne la forme «  strozí », p. ex. «  strozí starci » (des vieillards austères) et l’adjectif « ubohý » (misérable) fait « ubozí », p. ex. « ubozí mladíci » (des jeunes gens misérables).

Génération d’adverbes

Les adjectifs présentés ci-dessus peuvent engendrer des adverbes. A partir de l’adjectif « drahý » (cher), il est possible de générer l’adverbe « draze » (chèrement), à partir de « strohý » (austère) l’adverbe « stroze » (de manière austère, sèchement) et à partir de « ubohý » (misérable) on obtient l’adverbe « uboze » (misérablement).

 

2ème palatalisation :

Dans la conjugaison

Le verbe « táhnout » (tirer) a un participe passé passif en « tažen »  ainsi que l’adjectif dur correspondant « tažený » ((é)tiré) et le substantif verbal « tažení » (campagne, expédition). De même, « střihnout » (couper avec des ciseaux) a un participe passé passif en « střižen », l’adjectif dur qui en découle « střižený » (coupé, découpé) et le substantif verbal « střižení » (coupe, découpe).

A partir de « trhnout » (tirer, déchirer), nous trouvons les formes impersonnelles classiques du participe passé passif « tržen », de l’adjectif dur qui en découle « tržený » et du substantif verbal « tržení » à côté de formes parlées qui ont tendance à entrer dans la norme, respectivement « trhnut », « trhnutý » et « trhnutí ».

Dans la dérivation

Nous classerons déjà dans la dérivation l’obtention de l’autre aspect. Un exemple possible est le verbe « smahnout » (frire), rare, qui donne l’imperfectif « smažit », lui bien connu. Cet imperfectif génère normalement le participe passé passif « smažen », l’adjectif correspondant « smažený » (frit, pané), par exemple « smažený sýr » (fromage pané), « smažený řízek » (escalope panée) et le substantif verbal « smažení » (friture).

Nous nous efforcerons ensuite de présenter ici et dans les séries suivantes un certain nombre d’exemples ordonnés de la même manière que dans la série « k-c-č ».

Nous débuterons donc par la présentation de la formation de l’adjectif d’appartenance lié à un possesseur féminin : à partir du substantif féminin « Olga », on obtient l’adjectif « Olžin » (qui appartient à Olga).

De « koželuh » (tanneur), on obtient le féminin correspondant avec une 2ème palatalisation « koželužka ». De même, « biolog » donnera « bioložka », « soudruh » fera « soudružka », « dobrodruh » « dobrodružka » et avec un type différent de suffixation « vrah » aura un féminin en « vražedkyně ».

Nous rencontrerons pléthore de diminutifs, par exemple pour des masculins « kruh » (cercle) a pour diminutif « kroužek » (petit cercle, petit anneau), « sníh » (neige) peut avoir « snížek » comme diminutif et même « pstruh » (truite) peut avoir un diminutif en « pstroužek » (petite truite).

Pour les féminins, nous pouvons reprendre l’exemple de « noha » (pied, jambe) qui possède le diminutif « nožička », mais aussi « nožka » dans l’ordre « noha » – « nožka » – « nožička ».

On peut rencontrer des dérivations nominales autres que des diminutifs, par exemple de « koželuh » (tanneur) il est possible de créer le substantif féminin « koželužna » (tannerie).

De « jih » (sud), on peut créer l’adjectif dérivé correspondant « jižní » (du Sud, méridional, tropical), de « průběh » (déroulement) on peut dériver l’adjectif « průběžný » (continu) et l’adverbe « průběžně » (en continu).

Le dérivé peut être aussi un verbe comme « běžet » (courir) obtenu à partir de « běh » (course), « vážit » (peser) à partir de « váha » (poids, bascule), « snažit se » (s’efforcer de) à partir de « snaha » (effort).

Enfin, les comparatifs et superlatifs des adverbes se feront à l’aide de la 2ème palatalisation, par exemple « stroze » (de manière austère) donnera « strožeji » au comparatif et « uboze » (misérablement) fera « ubožeji ». L’adverbe « draze » (chèrement) a un comparatif en « dráže ».

Notons que les comparatifs et superlatifs des adjectifs fonctionnent de manière analogue : « drahý » (cher) donne « dražší », « strohý » (austère) donne « strožejší » et « ubohý » (misérable) « ubožejší ».

  

Récapitulation des exemples :

        • « noha » – « noze » – « nožní » / « nožka » – « nožička »
        • « váha » – « váze » – « vážit »
        • « snaha » – « snaze » – « snažit se »
        • « obloha » – « obloze » – « obložit » (afférent à ‘obloha’ dans le sens de garniture : garnir)
        • « liga » – « lize » – « — »
        • « Olga » – « Olze » – « Olžin »
        • « koželuh » – « koželuzi » – « koželužka » / « koželužna »
        • « soudruh » – « soudruzi » – « soudružka »
        • « dobrodruh » – « dobrodruzi » – « dobrodružka » / « dobrodružný »
        • « vrah » – « vrazi » – « vražedkyně » / « vražedný »
        • « pstruh » – « pstruzi » – « pstroužek »
        • « drahý » – « draze » – « dráže » / « dražší »
        • « strohý » – « stroze » – « strožeji » / « strožejší »
        • « ubohý » – « uboze » – « ubožeji » / « ubožejší »
        • « táhnout » – « — » – « tažen »  / « tažený » / « tažení »
        • « střihnout » – « — » – « střižen » / « střižený » / « střižení »
        • « trhnout » – « — » – « tržen » / « tržený » / « tržení »
        • « smahnout » – « — » – « smažit » / « smažen » / « smažený » / « smažení »
        • « biolog » – « o biolozích » – « bioložka »
        • « kruh » – « o kruzích » – « kroužek »
        • « sníh » – « o snězích » – « snížek »
        • « jih » – « (o jizích) » – « jižní »
        • « průběh » – « o průbězích » – « průběžný » / « průběžně »
        • « běh » – « o bězích  » – « běžet » / « běžný » / « běžně »

 

I.1.a.3. L’alternance ch-š-š

Nous allons examiner cette troisième série d’alternances, la dernière pour les palatalisations des gutturales, présentée en troisième colonne du tableau ci-dessous, suivant les mêmes critères que pour « k – c – č » et pour « g/h – z – ž ».

 

 

1ère palatalisation :

Flexion de substantifs

Les substantifs féminins durs dont le radical se termine par « ch » devant la désinence « a » subissent la 1ère palatalisation au datif et au locatif singulier. Ainsi, « valcha » (la planche à laver) prend-elle la forme « valše » pour ces deux cas. Il en va de même pour « snacha » (bru) qui donne « snaše », « ropucha » (crapaud) qui fait « ropuše », « sprcha » (douche) qui fait « sprše », « mrcha » (salaud, garce) qui fait « mrše »…

Le masculin offre des exemples en nombre nettement plus conséquent. Un substantif masculin dur animé tels que « hoch » (jeune homme) possède un nominatif pluriel « hoši » et un locatif pluriel « o hoších ». Le substantif « hroch » (hippopotame) fat de même respectivement « hroši » et « o hroších ». Dans bon nombre de mots, la terminaison « och » est en fait un suffixe : « divoch » (homme sauvage) qui vient de « divý » (sauvage, avide), mais que l’on associera aussi à « divoký » et qui donnera le nominatif pluriel « divoši » ainsi que le locatif pluriel « o divoších », « lenoch » (paresseux) dérivé de « líný » donne les formes « lenoši » et « o lenoších », « tlusťoch » (homme gros, obèse) dérivé de « tlustý » (gros, gras) fait respectivement « tlusťoši » et « o tlusťoších » et « černoch » (homme noir) de « černý » (noir) donne « černoši » et « o černoších ».

Le substantif neutre dur « ucho » (oreille) a pour pluriel les anciennes formes de duel qui sont toutes palatalisées : nominatif « uši », génitif « uší », datif « uším », accusatif « uši », vocatif « uši », locatif « o uších » et instrumental « ušima ». Lorsque « ucho » désigne par analogie l’anse d’un objet, le pluriel est celui du modèle « město » (ville) et donc sans palatalisation.

Flexion d’adjectifs

Lorsqu’ils sont liés à un substantif masculin animé  au nominatif ou au vocatif pluriel, les adjectifs durs vont subir la palatalisation de la consonne finale « ch » devant la voyelle molle « í ». Nous trouverons ainsi « tichý » (silencieux, tranquille) : « tiší », « suchý » (sec) : « suší », « jednoduchý » (simple) : « jednoduší ».

Génération d’adverbes

La 1ère palatalisation joue également dans la fabrication de l’adverbe sur la base de l’adjectif : « suchý » (sec) génère l’adverbe « suše » (sèchement) dans des phrases telles que « odpověděl suše » (il répondit sèchement), « jednoduchý » (simple) donne « jednoduše » (simplement), « tichý » (silencieux, tranquille) fait « tiše » (silencieusement).

 

2ème palatalisation :

En tchèque actuel, les deux types de palatalisation de « ch » ne se distinguent plus provoquant une transformation en « š » dans les deux cas. C’est pourquoi nous nous réfèrerons aux deux séries précédentes (« k-c-č » et « h/g-z-ž ») pour déterminer les catégories lexicales concernées par la 2ème palatalisation.

Dans la conjugaison

Le verbe « nadchnout » (enthousiasmer) fait au participe passé passif « nadšen » (enthousiasmé) qui dérive lui-même l’adjectif « nadšený » (enthousiasmé) et le substantif verbal « nadšení » (enthousiasme) correspondants. Les formes ci-dessus sont courantes et bien ancrées dans l’usage. Par contre, pour ces verbes en « -chnout », l’usage parlé avec la transformation en « -nut », « -nutý » et « nutí » est pratiquement exclusif. Vous rencontrerez de rares « rescapés » comme « utišen » du verbe « utichnout » (devenir silencieux) ou de « ohluchnout » (devenir sourd) le participe passé passif en « ohlušen » dans la traduction d’un film américain de 1990, « Def by Temptation » dans l’original qui donne en tchèque « ohlušen vzrušením » que je traduirais volontiers par « assourdi de stupeur ».

Dans la dérivation

Les féminins formés par la suffixation en « -ka » sur la base du masculin correspondant subissent la 2ème palatalisation, par exemple « černoška » (femme noire) d’après « černoch », « divoška » (femme sauvage) d’après « divoch », « tlusťoška » (femme grosse, obèse) de « tlusťoch ». En ce qui concerne « lenoch » (paresseux [substantif masculin dur animé]), son correspondant féminin « lenoška » (femme paresseuse) est peu utilisé, car supplanté dans l’usage par « lenoška » (canapé, bergère) issu d’un « lenoch » (accoudoir) qui est un masculin dur inanimé.

Les diminutifs sont également concernés. Ainsi, « mrcha » (salaud, garce) produit « mrška », « ropucha » (crapaud) donne « ropuška », « hoch » (jeune homme) aura « hošík » comme diminutif. Les termes avec un suffixe en « -och » peuvent avoir un diminutif en « -ošek » comme « lenoch » (paresseux) – « lenošek », mais ils ont le plus souvent un diminutif en « -oušek » : « lenoušek ». Ainsi, « tlusťoch » fait « tlusťoušek » et « černoch » fait « černoušek ». Dans ce dernier cas, il convient de signaler la forme « černouš » à côté de « černoch ». Pour « ucho » (oreille) existe le diminutif « ušičko ».

On note également des dérivations nominales autres que des diminutifs telles que « mršina » (charogne) à partir de « mrcha ».

De « ucho » (œil), on peut créer l’adjectif dérivé correspondant « ušní » (de l’oreille, auriculaire). De « hroch » (hippopotame), on peut créer l’adjectif relatif aux animaux qui est, de facto, l’adjectif d’appartenance avant l’apparition de l’adjectif aux suffixations en « -ův- » ou « -in- », à savoir l’adjectif « hroší » (d’hippopotame), par exemple « má hroší kůži » (rien ne l’atteint [m.à.m.: il a une peau d’hippopotame]). L’adjectif lié à « ropucha » est « ropuší » (de crapaud), par exemple « ropuší vajíčka » (des œufs de crapaud).

Le dérivé peut être aussi un verbe comme « sušit » (sécher) obtenu à partir de « suchý » (sec) par exemple « sušit prádlo » (sécher le linge), « tišit » (rendre silencieux) obtenu à partir de « tichý » (silencieux), par exemple « tišit hlas » (baisser la voix) ou, avec une préfixation, « zjednodušit » (simplifier) sur la base de « jednoduchý ».

Enfin, les comparatifs et superlatifs des adverbes se feront à l’aide de la 2ème palatalisation, par exemple « tiše » (silencieusement) donnera « tišeji » au comparatif, « suše » (sèchement) fera « sušeji » et « jednoduše » fera « jednodušeji ».

Les comparatifs et superlatifs des adjectifs fonctionnent de manière analogue : « tichý » (silencieux) donne « tišší », « suchý » (sec) donne « sušší » et « jednoduchý » (simple) « jednodušší ».

 

Récapitulation des exemples :

        • « valcha » – « valše » – « — »
        • « snacha » – « snaše » – « — »
        • « ropucha » – « ropuše » – « ropuška » / « ropuší »
        • « sprcha » – « sprše » – « — »
        • « mrcha » – « mrše » – « mrška » / « mršina »
        • « hoch » – « hoši » / « o hoších » – « hošík »
        • « hroch » – « hroši » / « o hroších » – « hroší »
        • « divoch » – « divoši » / « o divoších » – « divoška »
        • « lenoch » – « lenoši » / « o lenoších » – « lenoška » / « lenošek » / « lenoušek »
        • « tlusťoch » – « tlusťoši » / « o tlusťoších » – « tlusťoška » / « tlusťoušek »
        • « černoch » – « černoši » / « o černoších » – « černoška » / « černoušek »
        • « ucho » – « uši » / « uší » / « uším » / « o uších » / « ušima » – « ušičko » / « ušní »
        • « tichý » – « tiší » / « tiše » – « tišit » / « tišeji » / « tišší »
        • « suchý » – « suší » / « suše » – « sušit » / « sušeji » / « sušší »
        • « jednoduchý » – « jednoduší » / « jednoduše » – « zjednodušit » / « jednodušeji » / « jednodušší »
        • « nadchnout » – « — » – « nadšen » / « nadšený » / « nadšení »
        • « utichnout » – « — » – « utišen »
        • « ohluchnout » – « — » – « ohlušen »

L’opposition dures – molles

 

Parmi les trois systèmes d’opposition présentés, l’opposition de dureté a une importance toute particulière. Elle concerne la flexion des substantifs, des adjectifs, la conjugaison des verbes, mais apparaît aussi dans les phénomènes de dérivation.

Il est nécessaire de l’avoir bien comprise pour pouvoir dominer une morphologie, tant flexionnelle que dérivationnelle, dont nombre de descripteurs soulignent la complexité et la difficulté résultante d’apprentissage.

Nous verrons plus loin deux faits primordiaux :

        • Il faut considérer uniquement les suites Consonne – Voyelle, l’inverse n’ayant aucune signification.
        • En tchèque, une suite Consonne – Voyelle ne peut pas avoir des valeurs de dureté différentes : toute suite « hétérogène » est transformée et ramenée à une suite molle quel que soit l’élément mou, consonne ou voyelle.  Il en résulte que toute suite hétérogène marque l’origine étrangère du mot dans lequel elle se trouve.
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