Nous allons présenter les palatalisations suivant le tableau qui sera ensuite utilisé pour en exposer le détail.
En première ligne sont énumérées les consonnes dures (un tableau) ou les consonnes mixtes (deuxième tableau). On trouvera, à la verticale de chaque consonne dure ou mixte, les consonnes molles correspondantes pour chacune des palatalisations possibles : « mouillures faibles » en deuxième ligne du tableau, « mouillures fortes » en troisième ligne :
L’approche de la palatalisation que nous vous proposons n’est pas basée sur une connaissance diachronique, mais sur le fonctionnement synchronique.
Il est ainsi possible d’affecter à chacun des deux niveaux (2ème et 3ème lignes) des domaines morphologiques spécifiques qui devraient vous aider dans l’apprentissage et la manipulation des palatalisations.
1. La palatalisation de la deuxième ligne (« mouillure faible ») est afférente à:
1.a. la flexion nominale (déclinaison des substantifs et des adjectifs)
1.a.1. flexion des substantifs
Par exemple pour les substantifs masculins durs animés la principale désinence du nominatif pluriel est le « i » (i mou bref) (on trouve également « ové »). Dans un mot tel que « kluk » (garçon), le « i » (i mou) transforme la consonne « k » dure en la consonne correspondante mouillée « c » :
La désinence « ě » du datif et du locatif singulier des substantifs féminins durs du modèle « žena » (femme) provoque la palatalisation de la consonne dure la précédant. Ainsi, dans le mot « holka » (petite fille) ci-dessous, le « ě » transforme la consonne « k » dure en la consonne correspondante mouillée « c », le « ě » devenant « e » en raison de l’interdiction de la double mouillure de « e » (Cf. https://linguotheque.huma-num.fr/a-propos-de-la-double-mouillure-de-e/):
1.a.2. flexion des adjectifs
Les adjectifs durs prennent, dans la norme écrite (les formes parlées afférentes seront vues plus loin dans la grammaire : https://linguotheque.huma-num.fr/declinaison-longue-dure/), un « í » (i mou long) comme désinence du nominatif pluriel des masculins animés. La transformation de la consonne dure précédant la voyelle molle (« í ») se fera suivant la règle 3 énoncée précédemment.
Nous aurons donc la transformation de « hezký » à « hezcí » :
« hezký kluk » (un joli garçon) deviendra au pluriel « hezcí kluci » (de jolis garçons).
1.b. la génération de l’adverbe à partir de l’adjectif
Le tchèque possède deux formes d’adverbes obtenues à partir de l’adjectif.
La première n’est autre que le neutre singulier de la forme courte de l’adjectif avec la désinence « o » (Cf. https://linguotheque.huma-num.fr/les-desinences-nominales/ et https://linguotheque.huma-num.fr/les-adverbes-vrais/).
La seconde se présente presque comme un cas supplémentaire de l’adjectif permettant d’obtenir un adverbe avec la désinence « ě ». Comme dans les exemples présentés ci-dessus, le « ě » provoque la palatalisation de « k » en « c », puis l’interdiction de la double mouillure produit « e » à la place de « ě » :
2. La palatalisation de la troisième ligne (« mouillure forte ») est afférente à:
2.a. la flexion verbale (conjugaison)
Si nous prenons des verbes tels que « téci » (couler [pour un liquide]), la racine qui est visible au passé (« tekl ») et au gérondif (« teka », « tekouc », « tekouce ») est « TeK » et pour « péci » (cuire au four) nous aurons un passé en « pekl », un gérondif en « peka », « pekouc », « pekouce » et la racine en « PeK ».
Ces deux verbes auront des formes palatalisées à la 2ème et la 3ème personnes du singulier ainsi qu’à la première et deuxième personnes du pluriel, où le « k » devient « č » devant le « e » de la désinence (une raison supplémentaire de considérer le « e » comme voyelle « mixte »). Nous aurons ainsi :
Pour bien comprendre le phénomène, il convient de savoir, la racine étant « PeK » (ou « TeK »), que la première personne du singulier était originellement « peku », ce qui correspond au schéma stable « consonne dure – voyelle dure (« u ») », ce qui vaut également pour la troisième personne du pluriel « pekou » « consonne dure – voyelle dure (« o ») ».
Les autres formes sont concernées par l’application de la règle 3 qui transforme la suite « consonne dure (« k ») – voyelle molle (« e ») » en « consonne molle (« č ») – voyelle molle (« e ») ».
L’usage oral a créé les formes actuelles « peču » et « pečou » par analogie avec les formes centrales du schéma ci-dessus. Une langue comme le haut-sorabe conserve toujours une forme « pjeku » pour la première personne du singulier et la troisième personne du pluriel à côté de « pječemy » (1ère personne du pluriel) et « pječemoj » (1ère personne du duel). Le bas-sorabe conserve également une forme en « pjaku ».
2.b. la dérivation
La présence d’une palatalisation lors de la formation d’un dérivé est un phénomène fréquent. La palatalisation « profonde » vaut en dérivation pour les consonnes gutturales (« g », « h », « ch », « k ») lors de la création de diminutifs ou d’adjectifs d’appartenance. Un bon exemple est donné par la formation d’un adjectif d’appartenance dont le possesseur est un féminin. Le suffixe permettant cette transformation d’un substantif féminin à un adjectif est « in », suffixe débutant par une voyelle molle qui transformera la dernière consonne du radical si celle-ci est dure.
L’adjectif d’appartenance formé sur le substantif « babička » (grand-mère) nous servira de référence :
En conclusion, nous pouvons récapituler ces connaissances à l’aide du tableau suivant qu’il est bon de retenir pour bien comprendre la morphologie tchèque :