L’assimilation de sonorité

 

L’assimilation de sonorité est un phénomène plus complexe que le simple assourdissement en fin de mot. Elle apparaît en présence d’une suite d’au moins deux consonnes de sonorité différente.

 

Principe de l’assimilation de sonorité

L’assimilation de sonorité peut s’exercer dans les deux sens : d’avant en arrière et d’arrière en avant. Dans le premier cas, elle est dite « progressive » et dans le second « régressive ». Dans les deux cas, la première consonne considérée donne sa sonorité à la seconde. On peut décrire la situation ainsi :

            Assimilation progressive :      CA CB  donne  CA CA

            Assimilation régressive :        CA CB  donne  CB CB

ou avec les caractéristiques de sourde et sonore :

            Assimilation progressive :      Csourde Csonore    donne  Csourde Csourde

            Assimilation progressive :      Csonore Csourde    donne  Csonore Csonore

            Assimilation régressive :        Csourde Csonore    donne  Csonore Csonore

            Assimilation régressive :        Csonore Csourde    donne  Csourde Csourde

 

L’assimilation régressive en tchèque

A l’intérieur des mots, l’assimilation des consonnes en tchèque est régressive. Nous allons en donner quelques exemples en nous appuyant sur les tableaux de https://linguotheque.huma-num.fr/les-consonnes-opposition-sonores-sourdes/.

 

1. Assimilation interne au mot

1.1. Assimilation avec une paire de consonnes

1.1.a. Exemples d’assimilation avec assourdissement

« obchod » (le commerce, le magasin) se prononce [opchot]. En effet, le « d » final se prononce [t] sous l’effet de l’assourdissement en fin de mot et le « b » se prononce [p] sous l’influence régressive de la sourde « ch ». Autrement dit, la sonore « b » devient la sourde « p » et la sonore « d » devient la sourde « t ». Nous pouvons représenter ces deux phénomènes sous forme de schéma :

 

Un autre exemple tel que « zpěv » (chant) illustre exactement les deux mêmes phénomènes et est prononcé [spěf]. Le « v » final subit l’assourdissement et est prononcé [f]. Le « z » sonore devant « p » sourd est assourdi et est prononcé [s].

 

 

1.1.b. Exemples d’assimilation avec sonorisation

A l’inverse, « kdo » (qui) présente une assimilation régressive qui transmet le caractère sonore de « d » à la consonne sourde « k » qui est alors prononcée « g » sonore ou plus exactement sonorisé. En effet, si une « assourdie » est bien sourde, une « sonorisée » n’est généralement pas aussi sonore que la sonore correspondante.

 

En russe, le mot correspondant « кто » plaide pour une assimilation progressive.

 

1.1.c. Confusions possibles à l’oral

Il peut arriver que deux mots avec une graphie proche puissent avoir la même prononciation par l’application de l’assimilation régressive sur l’un d’eux. Voici un exemple que vous ne rencontrerez vraisemblablement jamais :

        • « listonošky » (factrices), mot-à-mot : « list|o-noš|k|y » (celles qui portent des lettres)
        • « listonožky » (Notostracés – un ordre de crustacés), mot-à-mot : « list|o-nož|k|y » (qui ont les pattes en forme de feuilles) qui sera aussi prononcé [listonošky].
      •  

Mais il existe des exemples fréquents et gênants comme « správa » (gestion, administration) et « zpráva » (nouvelle) qui se prononcent de manière identique :

 

 

On vient de le voir à deux reprises, dans « zpěv » et dans « zpráva » : le « z » devant une sourde devient la sourde « s », ce qui pose problème. En effet, si vous avez appris à l’oral un mot débutant par « s », il vous faudra prendre le temps d’aller vérifier dans un dictionnaire la graphie du mot et mémoriser la consonne en tête de mot « s » ou « z » comme dans l’exemple ci-dessus. « s » et « z » sont tous les deux des préfixes potentiels.

 

1.1.d. Des exceptions

Il convent ici de citer deux exceptions.

Le groupe « sv » n’est pas « sensible » à l’assimilation. Il demeure « sv ». On prononcera « svůj » (son, le sien) [svůj] et non pas [zvůj].

Le groupe « sh » a un comportement particulier. De manière exceptionnelle, il subit une assimilation progressive en Bohême [sch] et régressive en Moravie [zh]. On prononcera en Bohême « na shledanou » (au revoir) [na schledanou] alors que vous entendrez [na zhledanou] en Moravie. On prononcera en Bohême « shoda » (concordance) [schoda], par exemple dans « shoda okolností » (concours de circonstances), « shon » (précipitation) [schon], « shodit » (mettre à bas) [schodit] et le très célèbre « shánět » (chercher, essayer de trouver) [schánět] qui a occupé les Tchèques pendant quelques décennies.

De manière surprenante, il y a une exception à l’exception qui retourne à la règle. On dira en Bohême « shora » et « seshora » (d’en haut) [zhora] et [zezhora].

 

1.2. Assimilation avec une seule consonne

Toujours à l’intérieur d’un mot, il peut y avoir assimilation avec les consonnes « c », « č » et « ř » du 2ème tableau de https://linguotheque.huma-num.fr/les-consonnes-opposition-sonores-sourdes/ qui ne sont pas en correspondance avec une autre consonne. On trouvera des mots tels que « léčba » (soin, traitement) prononcé [lédžba] ou « leckdo » (n’importe qui) prononcé [ledzgdo].

 

2. Assimilation à la limite de 2 mots

L’assimilation régressive de sonorité existe également à la limite de deux mots, mais elle ne sera pas perçue lors d’une assimilation par une sourde, puisque le mot précédent est déjà sous le coup de l’assourdissement en fin de mot :

« pod stolem » (sous la table) [pot stolem] ou « bez peněz » (sans argent) [bes peněs].

Elle sera par contre entendue si la dernière consonne est sonore par sonorisation du contexte précédent :

« víš dobře » (tu sais bien) prononcé [víž dobře].

Ceci vaut également si la consonne en fin de premier mot est sonore. L’assimilation régressive avec la première consonne du 2ème mot sonore prévaudra sur l’assourdissement en fin de mot. Ainsi, « když » (quand) s’assourdit en [kdyš] en tant que mot isolé, mais dans un contexte tel que « když dovolíte » (si vous permettez), l’assimilation régressive maintiendra la sonore [když dovolíte].