La description des consonnes tchèques est donnée dans un tableau orienté suivant deux axes, un axe horizontal donnant le lieu d’articulation et un axe vertical donnant le mode d’articulation. Ce tableau sera une référence utile dans plusieurs exposés ultérieurs : celui de l’opposition de sonorité marquée par le contraste « sonore – sourde » (cf. https://linguotheque.huma-num.fr/les-consonnes-opposition-sonores-sourdes/ et pages suivantes) et celui de l’opposition « dure – molle » (cf. https://linguotheque.huma-num.fr/lopposition-dures-molles/ et pages suivantes) qui débouche sur les phénomènes de palatalisation (cf. https://linguotheque.huma-num.fr/introduction-aux-palatalisations/ et page suivante).
I. L’axe horizontal ordonne les lieux où sont produites les consonnes d’avant en arrière de la bouche. Tous les points d’articulation donnent lieu à une opposition potentielle « sourde » / « sonore ».
Tout en avant de la bouche sont situées les « labiales », c’est-à-dire les consonnes produites au niveau des lèvres. Certains auteurs les subdivisent en « bilabiales » (« b », « p », « m ») et en « labiodentales » (« v », « f »), ce qui est la position de l’Institut pour la langue tchèque (Ústav pro jazyk český1) dont nous reprenons la subdivision des « alvéo-dentales » en « alvéo-dentales » (« d », « t », « n » ; « c » ; « z », « s » ; « l » ; « r ») et « post-alvéolaires » (« č » ; « ž », « š » ; « ř » qui sont, respectivement, les formes palatalisées de « c » ; « z », « s » ; « r »).
Suivent les « palatales », prononcées au niveau du palais de la bouche, « ď », « ť », « ň » qui sont respectivement les palatalisations des « alvéo-dentales » « d », « t », « n ». La consonne « j », le yod, est la mouillure par excellence.
Enfin, en arrière de la bouche, au niveau du voile du palais, sont réalisées les consonnes « vélaires » « g », « k », « ch » et au niveau du larynx, la « laryngale » « h ». Pour des raisons de facilité de l’exposé des palatalisations, les consonnes vélaires et laryngale seront regroupées sous le terme de « gutturales ».
II. L’axe vertical exprime la manière dont la consonne est réalisée, en allant du haut vers le bas, d’une fermeture totale du chenal expiratoire vers des ouvertures de plus en plus libres.
Nous trouverons ainsi de haut en bas :
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- des consonnes produites par fermeture (par occlusion) du chenal expiratoire : ce sont des « occlusives »,
- des consonnes produites par une occlusion suivie d’un relâchement progressif : ce sont des « mi-occlusives » (dénommées également « affriquées »),
- des consonnes obtenues par resserrement plus ou moins fort du chenal expiratoire sans fermeture totale : ce sont des « constrictives ».
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II.1. Consonnes occlusives
Dans le tableau ci-dessus, sur la ligne des occlusives, on trouve en premier lieu, en avant de la bouche, des « occlusives labiales », la première « b » est sonore. Elle possède un correspondant sourd, la deuxième labiale « p ». A ces occlusives de la première ligne dites « orales » correspondent en seconde ligne des « occlusives nasales ». Ces dernières sont obtenues par abaissement du voile du palais qui laisse alors passer de l’air également par les fosses nasales. En ce qui concerne les occlusives labiales, la nasale est « m », sonore, qui est le correspondant de l’orale « b ».
Au niveau des alvéo-dentales, l’occlusive sonore est « d », l’occlusive sourde est « t » et l’occlusive nasale, sonore, correspondant à « d » est « n ».
Au niveau des palatales, l’occlusive sonore est « ď », l’occlusive sourde est « ť » et l’occlusive nasale, sonore, correspondant à « ď » est « ň ». Rappelons que « ď », « ť » et « ň » peuvent être les palatalisations respectivement de « d », « t » et « n ».
Enfin, les occlusives vélaires orales, sonore « g » et sourde « k » ne possèdent pas de correspondant nasal sonore.
II.2. Consonnes mi-occlusives
Le tchèque ne possède que deux mi-occlusives, toutes les deux sourdes. La première « c » est une alvéo-dentale présentant en un seul phonème [ts] une occlusive « t » et une constrictive (dite aussi « fricative ») « s ». La seconde « č » est une post-alvéolaire présentant en un seul phonème [tš] une occlusive « t » et une constrictive « š ». La seconde peut être une palatalisation de la première.
Les consonnes « c » et « č » possèdent un « auto-correspondant » sonore : dans des positions de sonorisation, le graphème « c » sera prononcé presque [dz] et le graphème « č » presque [dž], car si un phonème sonore est assourdi, il devient bien un phonème sourd, mais à l’inverse, si un phonème sourd est sonorisé, il ne sera pas totalement ce que serait le phonème sonore (cf. https://linguotheque.huma-num.fr/les-consonnes-opposition-sonores-sourdes/). En tchèque, « dž » existe dans quelques mots étrangers : « džem » (confiture), « džez » (jazz), « džinsy » (jeans), « džudo » (judo), « džungle » (jungle), « džus » (jus de fruit). L’origine des mots « džbán » (cruche) et « džber » (baquet) n’est pas claire.
II.3. Consonnes constrictives
Elles sont subdivisées en trois sous-catégories : des consonnes constrictives dites « vraies », parce qu’en fait elles ne possèdent aucun trait distinctif supplémentaire contrairement à la « latérale » et aux « vibrantes ».
La série des constrictives vraies est attestée à tous les points d’articulations.
Au niveau des labiales, nous trouvons une constrictive labiale sonore « v » et sa contrepartie sourde « f ». Les alvéodentales se répartissent en sonore « z » et sourde « s », les alvéolaires en sonore « ž » et sourde « š », ces deux dernières pouvant être la palatalisation respectivement de « z » et « s ». Au niveau des palatales, nous ne trouvons que la sonore « j ». La dernière paire est constituée de la laryngale « h » sonore et de la vélaire « ch » sourde qui lui correspond.
La constrictive alvéo-dentale sonore « l » est dite « latérale » parce que l’air passe d’un côté de la langue ou de l’autre.
Les constrictives vibrantes sont toutes deux sonores et dans une relation potentielle de palatalisation. La première est l’alvéo-dentale « r », la seconde est la post-alvéolaire « ř ». Elles sont dénommées « vibrantes », parce que l’air passe en roulant sur le bout de la langue (apex en latin), ce qui peut leur valoir la dénomination « d’apicales ». « ř » est la variante mouillée, palatalisée de « r » et représente une difficulté certaine de prononciation.
Le tchèque présente pourtant peu de difficultés de prononciation. Les rares phonèmes pouvant poser problème sont: “h”, “ch”, “r” et surtout “ř”. Ce dernier phonème peut faire difficulté aux étrangers tant sous sa forme sonore [rž] que sourde [rš]. Il peut même révéler un tchèque émigré depuis de nombreuses années.
La situation devient un peu plus délicate lorsque plusieurs de ces phonèmes sont proches ou contigus: “chrám” (l’église, le temple), “chřest” (l’asperge), “chrpa” (le bleuet), “chrabrost” (la bravoure), “řeřicha” (le cresson), “choroba” (la maladie), “vrch” (la colline).
Note:
1 Voir la présentation à l’adresse https://prirucka.ujc.cas.cz/?id=905