Dans les langues slaves, le genre est fortement lié à la forme du substantif. Les masculins sont terminés majoritairement par une consonne, les féminins par une voyelle “a” (“a” et “e” en tchèque), les neutres par une voyelle “o” ou “e”. On trouve cependant un certain pourcentage de formes vocaliques dans les masculins et, à l’inverse, de formes consonantiques dans les féminins.
Nous pourrons donc répartir les substantifs féminins en deux catégories: ceux terminés par consonne et ceux terminés par voyelle. En polonais, il existe très peu de substantifs féminins terminés par “e” (une cinquantaine) et ce sont des mots d’origine étrangère. Les substantifs féminins vocaliques sont donc terminés en -a. Nous allons étudier ici la forme du génitif pluriel d’un sous-ensemble de féminins vocaliques, numériquement important, ceux terminés en -ka. Voir: https://linguotheque.huma-num.fr/genitif-pluriel-des-substantifs-feminins-en-polonais/, paragraphes I.3. Terminaisons du génitif pluriel et II.1. Type vocalique dur: désinence zéro.
Il existe en effet 10000 substantifs féminins terminés en -ka pour un ensemble de féminins vocaliques d’environ 20000 mots, soit la moitié.
Le génitif pluriel des substantifs féminins terminés en -ka
C’est cet ensemble de substantifs féminins terminés en -ka que nous allons examiner dans le détail. Les langues slaves (à l’exception du bulgare et du macédonien, devenus isolants) sont des langues flexionnelles externes. Elles portent les marques flexionnelles en fin de mot. Nous examinerons donc les différentes possibilités de flexion à partir de la fin du mot, d’arrière en avant. Nous ferons une première subdivision suivant que le caractère précédant “ka” est une consonne ou une voyelle.
I. Le génitif pluriel des substantifs féminins terminés en -Vka
Au niveau algorithmique, les choses sont simples: à partir du moment où “ka” est précédé d’une voyelle, qu’elle soit nasale (ąę) ou orale (aeioóuy), le génitif pluriel s’obtient en retirant la désinence du nominatif singulier, à savoir “a”, SAUF s’il s’agit de l’un de ces deux mots “męka” (tourment, torture) ou “ręka” ( main), où, EN PLUS, la voyelle radicale passe de “ę” à “ą”. Nous obtiendrons ainsi “mąk” et “rąk”.
Les autres substantifs féminins terminés en -ęka ne présentent pas d’alternance de la voyelle radicale. Ainsi, “poręka” (garantie) a-t-il un génitif régulier en “poręk”.
Le schéma ci-dessous présente le mode de flexion du génitif pluriel pour les substantifs féminins terminés en -voyelle-ka:
Figure 1: le génitif pluriel des substantifs féminins terminés par -voyelle-ka
II. Le génitif pluriel des substantifs féminins terminés en -Cka
La flexion du génitif pluriel des substantifs féminins terminés en -consonne-ka est aussi marquée par une désinence vide (dite “désinence zéro”). La liste des consonnes polonaises est la suivante: “bcćdfghjklłmnńpqrsśtvwxzźż”. Au génitif pluriel, les substantifs concernés seront donc terminés par (au moins) 2 consonnes consécutives.
Cette configuration finale est concernée par la loi de Havlík qui apporte un éclairage en se référant à la disparition ou à la vocalisation des jers, éléments vocaliques brefs, suivant leur position dans le mot. Elle explique l’apparition d’une voyelle épenthétique entre les deux consonnes. On pourra se reporter avec profit à la leçon de grammaire historique tchèque “Disparition et vocalisation des jers” à l’adresse https://linguotheque.huma-num.fr/disparition-et-vocalisation-des-jers/ (page en cours de réalisation). Ici, comme en tchèque, la voyelle épenthétique est “e”.
La situation algorithmique est simple, puisque nous n’avons que deux alternatives. Un traitement particulier est provoqué par les consonnes molles avec pour signe diacritique la “kreska”, à savoir “ćńśź”, lorsque l’une d’elles se trouve devant -ka. Le polonais ne possède que deux diacritiques, la kreska (“accent aigu”) et le point suscrit que l’on ne trouve que dans le caractère “ż”, préférant les combinaisons de caractères, par exemple “cz” là où le tchèque possède le caractère diacrité “č”.
Si la consonne précédant -ka n’est pas l’une des 4 consonnes molles ci-dessus, le génitif pluriel se construit sans désinence et avec l’insertion de “e” entre les deux consonnes finales: żyłka (veine) fait “żyłek” au génitif pluriel. C’est la règle générale.
Par contre, si la consonne précédant -ka est l’une des 4 consonnes molles, on conserve la forme de génitif obtenue ci-dessus, mais en plus il y a un traitement de la mouillure représentée par la kreska. Elle passera de la position sur le caractère à une position après le caractère, mais sous forme de “i”. Ce n’est en fait qu’une convention d’écriture. Nous aurons ainsi: dyńka (courge) : dyniek, ośka (essieu) : osiek.
Le schéma ci-dessous illustre la flexion du génitif pluriel pour les substantifs féminins terminés en -consonne-ka:
Figure 2: le génitif pluriel des substantifs féminins terminés par -consonne-ka
III. Récapitulation
Nous avons présenté la génération du génitif pluriel des substantifs féminins terminés en -ka en deux phases suivant que la terminaison est précédée d’uns consonne ou d’une voyelle. Dans les deux cas, il convient d’examiner un cas particulier avant de générer le cas général. Ce qui marque l’ensemble de la terminaison est l’absence de désinence au génitif pluriel, ce que nous présentons ci-dessous:
Figure 3: le génitif pluriel des substantifs féminins terminés par -ka